14 10, 2011
Jungle adventure’s
Première nuit laotienne après un passage tardif de la frontière : première drache qui édicte que la règle ici c’est de dormir sous un toit quoi qu’il arrive. La mousson n’a pas dit son dernier mot dans ce monde tropical. Et oui la fin de la Chine avait déjà fait office de transition mais dès notre entrée au Laos on se retrouve dans la vraie jungle !
Se retrouvant sur une route cul-de-sac longeant une rivière on entreprend la construction d’un radeau dans un petit hameau de jungle. L’unique question en suspend est de savoir s’il supportera à la fois nos vélos, nos bagages et nous-même. Le test de flottaison n’est pas faisable (trop de courant) mais…ça passe ! On réalise vite à nos dépends que l’épopée ne sera pas de tout repos : redirection constante à l’aide de pagaies et heureusement d’un gouvernail fait-maison très efficace. Le but étant d’éviter les branches suspendues près des rives, les contre-courants latéraux qui nous traînent dans des boucles sans fin, les rapides et par dessus tout les rochers ! Quand nos pagaies ne suffisent pas, on nage en tirant notre embarcation pour influer sur la trajectoire.
Les 3 journées sont longues. 8h sur le radeau, sans pause midi (trop de courant encore une fois). Le soir vient l’épreuve pour amarrer dans les villages que l’on passe de temps à autres. Débarquement digne du XVIe siècle dans les villages remplis de mômes aux yeux écarquillés. Ni électricité, ni route, mais toujours un vieux du village pour nous offrir du riz, du bambou ou un poulet abattu pour l’occasion. Les petites têtes curieuses s’agglutinent dans les maisons sur pilotis, les mêmes visages hallucinés que les pêcheurs de la journée qui nous croisent en remontant la rivière en bateau. Notre passage déclenche assurément des cris de villageois qui courent le long des rives ou des rires dont on ne voit pas les auteurs embusqués dans la jungle.
Mis à part une crevaison d’une chambre à air (mais ça on la fait pas à des cyclistes), ça passe…jusqu’à « The crash ». En fin de journée, nous voulons éviter un énième rocher mais malgré nos tractions à la nage le courant en décide autrement. Plus moyen de se remettre sur le radeau au dernier moment, Jon se fait emporter dessous et un clou saillant datant d’un accroc matinal entaille sa cuisse sur plusieurs centimètres. Le radeau reste accroché aux rochers en plein rapide, et Jon s’y agrippe. Il parvient tant bien que mal à monter sur les rochers pour débloquer l’embarcation sans manquer de sauter dessus pour aller repêcher Max emporté plus loin, qui lutte contre le courant. Pendant que Max galère pour amarrer, Jon arrive à nager jusqu’à la rive. Tout en maintenant fermé sa blessure à l’aide de ses mains, il arpente le village en criant « doctor ». C’est à ce moment bien précis que l’on réalise que le peuple laotien est plutôt peace, rien n’est jamais urgent, tout se fait tranquillement. Pour finir un type déniche un bateau à moteur pour nous amener à un village raccordé à la route. Là, une simple grimace de l’infirmier du dispensaire pour comprendre que nous ne sommes pas au bon endroit, direction plus gros village le long du Mékong. Changement de transport, un camion nous emmènent jusqu’à l’hôpital de jungle de Pak Tha une heure plus tard. Un médecin suture la plaie (avec endormissement local plutôt raté) et Jon finit par tomber dans les bras de Morphée à l’hôpital alors que Max refait le trajet en sens inverse pour rechercher nos vélos. Nous nous rendons ensuite en ville, pour le premier trajet avec les vélos dans un camion du voyage…On appelle ça un cas de force majeur.
Malheureusement une infection se déclare les jours suivants : commence alors les visites quotidiennes à l’hôpital et une longue attente nerveuse dans une chambre. Nous restons dans cette ville-frontière prêts à basculer en Thaïlande si complication il y a. L’infection se résorbe, on choisit donc de prendre le bateau de 2 jours sur le Mékong qui nous emmène à Luang Prabang, 2ème plus grande ville du Laos. Mais l’hôpital n’est toujours pas celui que l’on recherche, les grimaces des infirmières en disent long. Là l’infection reprend le dessus. On dé-suture la blessure pour aérer : retour au point de départ 10 jours après l’accident. Le but est de voir un médecin européen avec qui on serait communiquer, ce qu’arrange l’assurance. Tant que l’infection reste locale, Jon refuse le rapatriement proposé.
Sachant Jon hors de danger, Max qui tourne comme gorille en cage s’en va parcourir seul le reste du Laos. Il découvre bien vite les quelques avantages de la vie solitaire (arrêt quand on veut) mais aussi les inconvénients, comme le manque de communication. La routine s’installe, les jours et les nuits défilent sous la chaleur constante (on s’endort aux environs des 28 degrés). Heureusement le charme, la peace-attitude et l’accueil des laotiens sont là pour maintenir le moral. Le gros hic : le sticky rice matin, midi et soir mais ça force les papilles et il y prend même goût ! Alors qu’on pensait en avoir fini avec les montagnes, Max arpente des montées abruptes – mais courtes – du Laos qui, sous une chaleur humide le fait transpirer jusqu’à la dernière goutte. Blague à part, nous devons quand même à cette Cordillère anamitique (chaîne de montagne séparant le Laos du Vietnam) de nous avoir protégé des typhons et des pluies qui font des ravages dans les pays côtiers. Saison des pluies oblige, Max se heurte tout de même à une paire de sérieuses averses et inondations. Les routes sont souvent sous eau, ravagées par des glissements de terrain ou des landes boueuses à un point de rendre le vélo impraticable.
Pendant ce temps, Jon vit une parenthèse confort au milieu des laotiens décidément très aimables qui ne se lassent pas de demander « how is your leg ? ». Un orthopédiste français à fait l’intervention chirurgicale nécessaire : découper la peau durcie et refermer la large plaie ouverte par une suture secondaire. Pour mettre les chances de son coté il ne peut pas bouger. Le frangin Cedric vient visiter illico, un peu sur un coup de tête. La suite, c’est une attente dans chambre climatisée (payée par l’assurance). La cicatrisation prend bien, avec en prime une excursion en moto louée avec le frère avant son retour. Quand la santé va tout va (et quand la famille est là c’est encore mieux), Jon reprend du poil de la bête et rejoint Max déjà au Sud du Laos. Nous écoulons quelques jours dans des îles du Mékong qui sont un vrai petit coin de paradis où chaque soir le ciel s’embrase de milles feux. Le reste du chemin qui nous sépare du Cambodge se fait bon gré mal gré avec un problème de vélo, mais ça ce sont des galères qui font partie du Cambodge !